Quand nos blessures d’enfance façonnent nos liens
On ne cesse jamais vraiment d’aimer quelqu’un. Si l’amour disparaît, peut-être n’était-ce pas de l’amour, mais plutôt l’attachement à ce que l’autre nous apportait, plutôt qu’à ce qu’il était réellement.
Il est possible de ne pas être d’accord avec les choix ou les comportements de l’autre sans pour autant cesser de l’aimer. L’amour inconditionnel (agapè en grec) ne signifie pas approuver tout ce que l’autre fait, mais rester dans le lien malgré les désaccords, malgré les turbulences.
Cette confusion entre amour inconditionnel et soutien conditionnel est l’un des grands drames de l’humanité, profondément ancrée dans les histoires familiales.
Souvent, dans nos relations avec nos parents ou nos proches, cet amour a été teinté de conditions justement : nous avons ressenti, consciemment ou non, que nous devions “faire” ou “être” quelque chose pour maintenir le lien et continuer à nous sentir aimables.
Si vous êtes parent aujourd’hui, vous savez peut-être à quel point il est difficile de signifier son désaccord avec le comportement de son enfant tout en maintenant le lien. Pourtant, beaucoup d’entre nous ont grandi avec cette impression que ce lien, et donc cet amour, pouvait s’interrompre à cause d’un mensonge, d’une colère, d’une maladresse, ou d’un échec que l’enfant que vous étiez avait commis ou vécu.
Parfois, c’était encore plus subtil : un parent, malgré l’amour qu’il vous portait, pouvait être lui même submergé par ses propres peurs ou son impuissance face à votre émotion ou votre maladie. Vous vous sentiez alors émotionnellement seul au moment où vous en aviez le plus besoin.
Même sans mots explicites, le non-verbal du parent parlait : une distance, une colère, une bouderie, et un lien qui semblait se couper. Ces expériences répétées ont ancré en vous cette idée :
“On peut m’enlever l’amour et le lien qu’on me porte quand je ressens ou je fais ceci ou cela.”
En réponse et pour ne pas avoir à vivre cette douleur la plus douloureuse qui soit, nous avons appris à nous conformer, à nous conditionner, à nous soumettre, à étouffer nos émotions. Ou, pour certains, à nous rebeller : la colère devenait un moyen de masquer la douleur et la peur de la rupture du lien et de l’amour.
Ces blessures restent en nous, comme des plaies invisibles mais prêtes à se rouvrir. Et tôt ou tard, elles refont surface – parfois dans notre relation avec un cheval qui croise notre chemin.
« Il ne veut pas être avec moi… Je ne suis pas assez ceci, trop cela… »
Ces pensées ne viennent pas de lui. Ce n’est pas le cheval qui vous rejette ou qui vous juge. Ce qu’il reflète, ce sont les blessures profondes que vous portez depuis longtemps, souvent enracinées dans votre histoire personnelle, souvent depuis l’enfance. Ces doutes et jugements sont les échos de ce passé, et non le reflet de votre valeur ou de votre lien avec lui. Il est simplement le miroir de vos émotions et de vos croyances profondes.
Le lien authentique avec votre cheval ne peut se construire sur la peur ou le conditionnement. Il demande de votre part une reconnexion à vous-même, une guérison de ces blessures d’enfance.
Alors, prenez soin de ces blessures. Apprenez à les reconnaître, à les comprendre, et à les transformer. Quand vous le ferez, votre cheval le sentira. Le lien entre vous deviendra plus fort, plus sincère, et il s’apaisera à votre contact.
David PIRIOU, thérapeute Gestalt et moniteur d’équitation
Expert en bien-être psychologique des cavaliers